1729

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Ce moment fut court, mais délicieux à tous égards. Ce fut un de ces momens trop rares qui replacent les choses dans leur ordre naturel et vengent le mérite avili des outrages de la fortune. Quelques minutes après, Mlle de Breil levant derechef les yeux sur moi me pria d’un ton de voix aussi timide qu’affable de lui donner à boire. On juge que je ne la fis pas attendre, mais en approchant je fus saisi d’un tel tremblement qu’ayant trop rempli le verre je répandis une partie de l’eau sur l’assiete et même sur elle. Son frére me demanda étourdiment pourquoi je tremblois si fort. Cette question ne servit pas à me rassurer, et Mlle de Breil rougit jusqu’au blanc des yeux. Ici finit le roman ; où l’on remarquera, comme avec Made Basile et dans toute la suite de ma vie que je ne suis pas heureux dans la conclusion de mes amours.

Turin, février 1729 — Turin, 9 juillet 1998. Les Confessions, Livre troisième

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Les monts, les prés, les bois, les ruisseaux, les villages se succedoient sans fin et sans cesse avec de nouveaux charmes, ce bienheureux trajet sembloit devoir absorber ma vie entiére. Je me rappellois avec delices combien ce même voyage m’avoit paru charmant en venant. Que devoit-ce être lorsqu’à tout l’attrait de l’indépendance, se joindroit celui de faire route avec un camarade de mon age, de mon gout et de bonne humeur, sans gêne, sans devoir, sans contrainte, sans obligation d’aller ou rester que comme il nous plairoit ? Il falloit être fou pour sacrifier une pareille fortune à des projets d’ambition d’une execution lente, difficile, incertaine, et qui, les supposant realisés un jour, ne valoient pas dans tout leur éclat un quart d’heure de vrai plaisir et de liberté dans la jeunesse.

Mont-Cenis, été 1729 — Mont-Cenis, 6 juillet 1998. Les Confessions, Livre troisième

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