Mort

« Le discours des Rêveries, ce n’est plus celui d’un sujet éclairé par la lumière des mots pour le regard des autres, mais au contraire, autour d’un sujet présent à lui-même dans son intégralité et vivant dans un tout autre ordre que celui de ce monde, des mots rassemblés qui reçoivent de lui leur lumière. » (Alain Grosrichard, « Gravité de Rousseau » Les Cahiers pour l’analyse, L’Impensé de Jean-Jacques Rousseau, p. 63.)

« Oui, sans doute, il faut que j’aye fait sans que je m’en apperçusse un saut de la veille au sommeil ou plustot de la vie à la mort. » (Rêveries, p. 995.) L’état de rêverie est une mort qui s’oppose paradoxalement aux ténèbres qui ont précédé (Rêveries, p. 1076). La mort véritable ne serait alors qu’une simple séparation que Rousseau constate, voire invente (Confessions, p. 205, p. 282, p. 329).

Notes associées : Écriture, Promenade.

1776. Oriflamme Rousseau


Toute la puissance humaine est sans force desormais contre moi. Et si j’avois des passions fougueuses je les pourrois satisfaire à mon aise et aussi publiquement qu’impunément. Car il est clair que redoutant plus que la mort toute explication avec moi ils l’éviteront à quelque prix que ce puisse être. D’ailleurs que me feront-ils, m’arrêteront-ils, c’est tout ce que je demande et je ne peux l’obtenir. Me tourmenteront-ils ; ils changeront l’espèce de mes souffrances, mais ils ne les augmenteront pas ; me feront-ils mourir. Oh qu’ils s’en garderont bien. Ce seroit finir mes peines. Maitre et Roi sur la terre tous ceux qui m’entourent sont à ma merci, je peux tout sur eux et ils ne peuvent plus rien sur moi.

Paris, 1776 — Chambéry, 4 juillet 1998. Ébauches des Rêveries