Je ne sentis ni le coup, ni la chute, ni rien de ce qui s’ensuivit jusqu’au moment où je revins à moi. Il étoit presque nuit quand je repris connoissance. Je me trouvai entre les bras de trois ou quatre jeunes gens qui me racontérent ce qui venoit de m’arriver. Le Chien danois n’ayant pu retenir son élan s’étoit précipité sur mes deux jambes et me choquant de sa masse et de sa vitesse m’avoit fait tomber la tête en avant : la machoire supérieure portant tout le poids de mon corps avoit frappé sur un pavé très raboteux, et la chute avoit été d’autant plus violente qu’étant à la descente, ma tête avoit donné plus bas que mes pieds.
Paris, 24 octobre 1776 — Paris, 10 mai 1998. Les Rêveries du promeneur solitaire, Deuxième Promenade