1731, septembre. Quai Jean-Jacques Rousseau à Lyon


Je me promenois dans une sorte d’extase livrant mes sens et mon cœur à la joüissance de tout cela, et soupirant seulement un peu du regret d’en joüir seul. Absorbé dans ma douce rêverie je prolongeai fort avant dans la nuit ma promenade sans m’appercevoir que j’étois las. Je m’en apperçus enfin. Je me couchai voluptueusement sur la tablette d’une espéce de niche ou de fausse porte enfoncée dans un mur de terrasse : le ciel de mon lit étoit formé par les têtes des arbres, un rossignol étoit précisement au dessus de moi; je m’endormis à son chant ; mon sommeil fut doux, mon réveil le fut davantage. Il étoit grand jour : mes yeux en s’ouvrant virent l’eau,la verdure, un paysage admirable.

Lyon, septembre 1731 — Lyon, 21 septembre 1997. Les Confessions, Livre quatrième

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