1765, septembre. La lapidation


Je fus prêché en chaire, nommé l’antechrist, et poursuivi dans la campagne comme un Loup-garou. Mon habit d’Armenien servoit de renseignement à la populace; j’en sentois cruellement l’inconvenient; mais le quitter dans ces circonstances me sembloit une lâcheté. Je ne pus m’y résoudre, et je me promenois tranquillement dans le pays avec mon caffetan et mon bonnet fourré entouré des huées de la canaille et quelquefois de ses cailloux. Plusieurs fois en passant devant des maisons, j’entendois dire à ceux qui les habitoient : apportez-moi mon fusil, que je lui tire dessus. Je n’en allois pas plus vîte ; ils n’en étoient que plus furieux ; mais ils s’en tinrent toujours aux menaces ; du moins pour l’article des armes à feu.

Môtiers, septembre 1765 — Môtiers, 17 août 1997. Les Confessions, Livre douzième

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